Français, Polar/thriller français

Sa vie dans les yeux d’une poupée – Ingrid Desjours

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Je rattrape toujours le retard dans mes chroniques accumulé suite à mes lectures pendant mon voyage, et je vais vous parler aujourd’hui du thriller psychologique qui m’a accompagné durant toute la durée de mon vol aller. Commencé à l’aéroport de Paris, je l’ai lu d’une traite, car il était terminé à l’arrivée 8h plus tard au moment de l’atterrissage !

Est-ce que je l’ai aimé ? C’est peu de le dire ! Je gardais un excellent souvent du premier livre que j’ai lu de l’auteure, Les fauves, lu il y a quelques mois, et je n’ai à nouveau pas été déçue !

Je vous parle aujourd’hui de Sa vie dans les yeux d’une poupée, d’Ingrid Desjours, publié chez Pocket pour le format poche.

L’histoire (4è de couverture)

Provocateur, cynique et misogyne, Marc est affecté à la brigade des mœurs après un grave accident. Quand, dans le cadre d’une enquête, il croise la douce Barbara, le policier est troublé par son regard presque candide, touché par cette fragilité que partagent ceux qui reviennent de loin. Emu. Au point de croire de nouveau en l’avenir.

Mais il est aussi persuadé qu’elle est la pièce manquante pour démasquer le psychopathe qu’il traque. Et s’il se trompait ? Le pire des monstres est parfois qui s’ignore, quand bien même il rêve sa vie dans les yeux d’une poupée.

 

Ami lecteur, tu veux du cru, qui décoiffe ta tête de lecteur sans te faire bouger de ton canapé ?

Et bien tu vas en avoir !

Toute l’histoire est centrée sur la vie de Barbara, jeune esthéticienne à la personnalité lunaire, vivant avec sa mère qui détient une forte emprise sur elle. Nous la suivons dans son quotidien bien morose, partagé entre l’institut de beauté dans lequel elle travaille et dans lequel elle subi les moqueries de ses collègues, et son retour chez sa mère, même si le terme de génitrice conviendrait mieux. Sa vie est une succession de drames, de malheurs, de violences subies durant sa plus tendre enfance, d’abord par un père un peu trop aimant avec elle et qui la rejoindra régulièrement dans son lit le soir et achètera son silence grâce à des poupées qu’il lui offrira, et sa mère qui la déteste car selon elle, si son mari l’a quitté, c’est parce qu’elle le lui a volé. Déjà là, sans rentrer encore plus dans les détails sordides, avouez que ça calme !

J’ai ressenti une réelle et profonde empathie pour cette pauvre âme, malmenée durant toute sa triste existence et depuis sa plus tendre enfance à cause de parents qui n’auraient jamais dû le devenir. On en viendrait presque à lui pardonner les atrocités qu’elle commettra une fois devenue adulte, parce qu’elle est incapable de vivre autrement que dans la souffrance, la violence, parce qu’elle n’a jamais rien connu d’autre. Sa vie est une succession d’épreuves et de tragédies et combinées à esprit fragile, les dégâts émotionnels et psychiques sont colossaux, et l’entraînent dans une folie profonde qui lui fera perdre totalement pied avec la réalité. Nous l’accompagnerons alors dans sa longue descente aux enfers, où la folie se mêle à la détresse psychologique. On sent que ça va mal se finir, très mal. Il ne peut en être autrement quand on est allé aussi loin, quand la raison a foutu le camp à ce point-là.

J’ai été mal à l’aise durant cette lecture, parce que la plume acérée d’Ingrid Desjours apporte une noirceur intense au récit, elle se plaît à tisser autour de son personnage principal un univers sombre, glauque dans lequel vous vous sentirez de trop, mal à l’aise d’assister à cette déchéance et à cette soumission qu’elle s’impose. Les thèmes du viol, de la prostitution, de l’inceste, et autres joyeusetés du genre y sont développés et j’ai eu la nausée tout au long de ma lecture, avec une apogée au moment du dénouement quand on comprend bien trop de choses qu’on ne soupçonnait pas, et qu’on aurait préféré ne pas soupçonner ou comprendre d’ailleurs !

On en parle du dénouement ? non, on n’en parlera pas. Parce que déjà le spoiler ne passera pas par chez moi, mais en plus et surtout parce que vous ne ressentiriez pas les choses de la même manière si tout vous était dévoilé plutôt que si vous étiez arrivé à cette conclusion par vous-même après quelques heure de lecture éreintante. Finalement le but de ce livre, ce n’est pas sa conclusion, c’est le cheminement qui amène à ce dénouement. L’auteure ne nous sert pas du cru pour faire du gore dégueulasse gratuitement, dans le but unique de choquer son lecteur, elle le fait, avec ses mots durs et sa plume néanmoins féminine, afin de nous montrer comment une personne fragile en est arrivée là. Et puis, ça nous permet aussi de comprendre que derrière chaque personne étrange, chaque femme soumise, et chaque monstre, se cache peut-être d’abord une victime.

 

Le mot de la fin

Si je devais classer Ingrid Desjours dans une catégorie (vous l’aurez remarqué, j’adore les catégories ! ) elle irait directement rejoindre celle des femmes auteures qui en imposent grave, elle est de celles qui osent et qui ne font pas dans la dentelle.

L’intrigue prend son temps, il n’y a pas forcément un rythme d’action très rapide parce que l’auteure s’attache surtout à développer l’aspect psychologique du personne, qui prend toute la place dans l’histoire. C’est d’ailleurs un des codes du thriller psychologique, le fait de prendre son temps, histoire de bien poser les bases et de monter crescendo dans la folie.

C’est une lecture éprouvante et j’ai eu besoin d’un sas de décompression de 48h avant d’entamer un autre livre. Quand on ressent quelque chose d’aussi fort pour un bouquine, on n’a pas envie de passer tout de suite à autre chose, on veut se souvenir, on veut se remémorer certains détails, on en analyse d’autres et le constat que nous en faisons est ici, effrayant.

J’écris cette chronique 3 semaines après l’avoir terminé, et pourtant je me souviens de tout ou presque, tant certains passages ont laissé des traces en moi.

Et si un jour j’ai la chance de croiser Ingrid Desjours en dédicaces, pas de doute, je lui dirai la même chose que j’ai dite à Claire Favan lors de ma première rencontre avec elle : « vous m’avez traumatisée avec votre livre ! « 

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