Editions Ravet-Anceau, Polar/thriller français, Polars en Nord

Les chiens de la baie – Thierry Declercq

Polars en nord a encore frappé ! La collection des Editions Ravet-Anceau a pour objectif de proposer des polars/thrillers d’auteurs provenant du nord de la France, avec une histoire ancrée dans le terroir de cette partie de la France. Je vous avais déjà parlé de deux livres de cette maison : Jacks, de Benoît Chavaneau, et l’un de mes coups de cœur 2017, Les loups et l’agneau de Christophe Dubourg ; c’est maintenant au tour de Thierry Declercq de passer sur le gril, avec son livre Les chiens de la baie.

 Un conseil, ne vous fiez pas à la mignonne petite truffe du chien sur la couverture, parce que ce livre est tout, sauf un gentil petit thriller…

L’histoire (4è de couverture)

De la poudreuse jusqu’aux genoux, le commandant Vidal s’enfonce dans les mollières de la baie de Somme. Deux chasseurs ont retrouvé le cadavre d’un homme déchiqueté par des chiens. Leurs crocs puissants ont déchiré sa trachée puis se sont acharnés sur son corps. Comme s’ils étaient déterminés à le tuer. Le cadavre est celui du p’tit Freddy, un gars bien connu du coin et qui habite Cayeux avec son épouse Audrey. Si Vidal s’accroche à la thèse de l’accident, son adjudante Camille Maxime n’est pas de cet avis. Son expérience passée en brigade cynophile lui indique une autre voie. Déjà tendues, les relations entre les deux gendarmes de Saint-Valery deviennent détestables. La jeune femme reste convaincue que dans les brumes de la baie se cache un meurtrier aux abois.

Atmosphère, atmosphère !

Il y a des livres qui vous collent à la peau de manière désagréable plusieurs jours après l’avoir refermé, Les chiens de la baie en fait partie. Si j’ai réellement apprécié cette lecture très noire, j’en garde un arrière-goût désagréable, glaçant, dérangeant, tant l’auteur a réussi à créer une atmosphère pesante, glauque et macabre dans tout son récit. ça fait beaucoup d’adjectifs accumulés pour décrire un ressenti, mais c’est difficile de mettre des mots sur des émotions. Ce bouquin est une lecture marquante dans le sens où Thierry Declercq nous propose une plongée en eaux troubles, auprès des personnages ambivalents, ou simplement malfaisants…

Thierry Declercq nous fait évoluer dans un milieu pauvre, où chômage rime avec alcoolisme. Nous sommes confrontés à beaucoup de monde dans cette histoire, l’entourage de la victime, notamment sa femme, l’équipe de gendarmes, et les chasseurs, ceux qui ont découvert le corps, mais aussi ceux qui étaient proches de la victime qui chassait également avec eux. Un tableau sombre est dressé de ces derniers, présentés comme des espèces de beaufs, de sauvages barbares et alcoolisés. L’alcool est omniprésent, la violence aussi, aussi bien envers les humains que les animaux.

L’écriture de Thierry Leclercq est sans concession, elle n’épargne pas des détails crus ou sanglants, elle montre la réalité telle qu’elle est, rude et rustre. Que les sensibles à la cause animale comme moi se rassurent, il n’y a pas de passage trop insupportable lors des scènes de chasse, je n’aurais pas pu continuer ma lecture si ça avait été le cas. J’ai apprécié que l’auteur n’en fasse pas des tonnes avec ce sujet; il a réussi, à mon sens, à ne pas tomber dans un espèce de voyeurisme et de surenchère de scènes barbares qui remuent les tripes et l’âme. Il a réussi à me toucher de manière plus subtile, bien joué !

Par moment, Les chiens de la baie me rappelle un peu, dans une moindre mesure certes, l’étude sociale faite par Zola dans sa série des Rougon-Macquart. Déjà, parce que l’auteur dépeint ici la société dans laquelle évoluent les personnages de manière relativement précise, qu’il y plonge ses lecteurs qui ont l’impression d’y être, mais aussi et surtout parce que l’influence du milieu dans lequel évoluent les divers protagonistes prend une part importante dans leur vie : elle influe sur leurs actes et on peut même dire qu’elle constitue en quelque sorte la clé de voûte du destin morose des personnages.

Le secteur géographique dans lequel se déroule l’histoire est très présent, prenant vie sous la plume de l’auteur comme s’il s’agissait d’un personnage immatériel.  C’est une véritable plongée dans le cœur de la baie de somme qui est ici effectué, et ça m’a bien donné envie d’aller y faire un tour lorsque je troquerai ma casquette de blogueuse contre celle de globe-trotteuse. Il y a une certaine sensibilité dans l’écriture de l’auteur à décrire ces vastes étendues sauvages

Des personnages cabossés, des relations familiales toxiques

J’ai ressenti un certain attachement envers les personnages principaux, notamment au niveau des enquêteurs que nous suivons dans leur quotidien de flic. L’auteur a néanmoins humanisé ses personnages en multipliant les passages où nous sommes à leurs côtés dans leur vie personnelle, et axant plutôt son analyse sur leurs faiblesses et leurs casseroles que sur les points forts qui les caractérisent. A nouveau, peu de bouffée d’air pour le lecteur qui restera englué de manière étouffante dans ces sombres tranches de vie. Pas de répit, ni pour eux, ni pour nous. Noir c’est noir, il n’y a plus d’espoir

Je retiendrai comme personnage marquant Vidal, que je qualifierais de quasiment bipolaire tant son comportement peut être gerbant avec la jeune Audrey. Mais en parallèle je l’ai trouvé profondément touchant, parce que blessé par la vie, parce qu’il est en train de subir une des pires épreuves de son existence et que sa vie personnelle et familiale a volé en éclat, le laissant dans une profonde solitude. Je l’aurais purement détesté s’il n’y avait pas eu le côté humain, de développé. Finalement, j’en ai trouvé un peu, du positif !

Niveau familial… Il y a à dire mais je ne vais pas trop m’étaler car je vais commencer à être longue ! Là encore, si vous avez envie de belles histoires positives et réconfortantes, passez votre chemin, ce n’est pas ici que vous allez en trouver ! Les relations entre les différents membres d’une même famille sont détestables, les plus faibles sont soumis aux plus forts, à grand renfort de dérouillées et de violences morales, rabaissés continuellement pour qu’ils soient le plus asservis possibles.

Le mot de la fin

Vous l’aurez compris, ce livre a marqué mon âme de serial lectrice. Si vous aimez les thrillers d’atmosphère, foncez !

3 réflexions au sujet de “Les chiens de la baie – Thierry Declercq”

  1. Je viens de finir « les sanglots longs » de Philippe Masselot chez Polars en Nord, j’ai vraiment beaucoup aimé! Je vais donner mon avis d’ici samedi sur mon blog, mais vraiment c’est une belle découverte. C’est extrêmement bizarre de se retrouver face à des noms de ville qui me sont familiers en plein coeur d’une enquête policière. Cela rend le tout plus angoissant et prenant, encore!

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    1. Je me doute ! il y a peu de bouquins dont l’action se situe en Lorraine, du coup je ne connais pas trop ce sentiment mais j’imagine que ça doit faire bizarre 🙂 j’adore lire Indridason moi, ça me rappelle mes voyages en Islande et j’arrive très bien à m’imaginer les lieux et le contexte, du coup, j’adore ! Belle journée à toi!

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