Non classé, Québécois

5150 Rue des Ormes – Patrick Senécal

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J’avais déjà lu deux livres de Patrick Senécal l’an dernier, Le Vide, que je n’avais pas vraiment apprécié, et hell.com avec le coup de cœur que vous connaissez, je n’ai cessé de vous parler de ce livre ces derniers mois et il est dans mes livres favoris de 2016. J’ai entamé un peu par hasard 5150 Rue des Ormes, je l’ai terminé un peu avant Nouvel An, et je vais aujourd’hui vous en parler.

L’histoire

 Yannick est un jeune homme de 23 ans. Alors qu’il circulait à vélo dans sa nouvelle ville, il est victime d’un accident en voulant éviter un chat noir qui traversait la rue en courant. Son vélo étant hors d’usage, il frappe à la première porte venue, au 5150 Rue des Ormes, où il est accueilli par Jacques Beaulieu et son épouse Maud. Alors qu’il se rend dans la salle-de-bains de chez eux pour essayer d’enlever les tâches de sang qu’il a sur lui, il entend un bruit bizarre, comme un râle, dans la pièce d’à côté. Attiré par ce bruit et poussé par la curiosité, il entrouvre la porte et découvre un homme particulièrement mal en point, allongé par terre et attaché au mur à l’aide d’une chaîne. Yannick en a trop vu, il deviendra prisonnier de cette famille étrange et c’est un véritable huis clos qui va se mettre en place. Un détail intrigue le jeune homme, qui est autorisé à participer aux repas familiaux et à circuler dans la maison de manière quasi autonome lorsqu’il se tient calme : la cave, toujours fermée à clé, semble receler un lourd secret… Après quelques semaines passé prisonnier, Jacques pose un ultimatum à son prisonnier : champion incontesté d’échecs, réputé imbattable, il met au défi le jeune homme de le battre lors d’une partie. Une seule partie gagnée, et ça sera la liberté pour Yannick. Vont alors se succéder des semaines entières de jeux, des espoirs, des échecs, beaucoup d’échecs, et des vérités qui font froid dans le dos.

 Un huis clos angoissant

Patrick Senécal a réussi le tour de force de nous tenir en haleine sur 367 pages, dans un huis clos quasi-total, sans jamais nous ennuyer ou nous donner envie de refermer le livre en raison d’un manque d’action. Le huis-clos se veut asphyxiant, parce qu’on est enfermés malgré nous dans notre récit et dans cette famille de cinglés. L’emploi du « je » est majoritaire dans ce livre, c’est le jeune homme qui est le narrateur de cette situation infernale, qui est le témoin des agissements étranges de ses quatre bourreaux. La tenue du journal intime de Yannick nous plonge dans les détails de sa conscience, on assiste à sa colère, à sa rage d’être enfermé, à l’élaboration de ses plans pour se libérer, on assiste aussi à sa descente aux enfers et au fait qu’il perde pied moralement à un moment, faisant des choix complètement irraisonnés qui l’amèneront à des situations tout à fait absurdes et surréalistes.

Si Yannick a besoin d’extérioriser ce qui lui arrive par le biais de ses écrits, c’est également le cas de Maud, la mère de famille. Alors qu’elle est un personnage totalement effacé, qu’elle est profondément soumise dans son couple et dans sa famille, on découvre, à la lecture de son journal, ce qui a conduit cette femme à s’enfermer dans ce rôle. Nous sommes lecteurs de son journal intime, de sa jeunesse jusqu’à sa rencontre avec celui qui deviendra son mari, nous apprenons les difficultés rencontrées au sein de leur couple, nous assistons au début de la folie de Jacques et de sa quête pour Le Juste. Ce que nous allons découvrir à la cave, mes chers lecteurs, ça dépasse l’entendement! Je me demande où les auteurs de thrillers peuvent aller chercher des trucs pareils, mais c’est bon, c’est très bon parce que c’est complètement effrayant et inattendu!

Si les personnages sont parfois stéréotypés (le père règne en homme tout puissant, la mère vit sa vie à travers le prisme de la religion, passant d’une adoration d’un Dieu religieux à un Dieu humain, son mari), l’adolescente violente et sa cadette qui ne bouge pas et ne parle pas), j’ai néanmoins trouvé l’ensemble suffisamment réaliste pour créer en moi une sorte de sensation morbide en même temps qu’une étrange attraction qui me poussait pour continuer à aller toujours plus loin dans ma lecture.

C’est une relation déroutante qui se met en place entre les deux hommes, parce que malgré l’enfermement, un certain lien se crée au fil du temps. Jacques emploie un surnom pour parler à Yannick, ne l’appelle que rarement par son prénom. Et puis le jeu d’échec se met en place et prend de plus en plus d’importance au fil des chapitres. C’est un véritable combat qu’oppose les deux hommes, Yannick s’acharnera à battre son bourreau pour gagner sa liberté, quitte à sacrifier ses chances de fuites lors des absences de la famille. La bataille finale est cauchemardesque et je suis ressortie de cette maison au terme de deux jours de lecture, complètement ahurie…

Le mot de la fin

Avec Patrick Senecal, j’ai une « relation » en dents de scie. Soit je reste complètement dubitative, soit c’est un énorme coup de cœur. Je temporise ici, et sans parler de coup de cœur, j’ai vraiment bien aimé ce livre.

Un bon livre qui tient en haleine, c’est tout ce qu’on demande parfois.

A noter qu’un film a été tiré du livre, il porte le même titre et est en version canadienne. J’ai tenté de le regarder un soir mais Z’homme qui  n’avait pas lu le livre n’a pas compris grand chose des dialogues en raison d’un fort accent québécois et je l’ai arrêté au bout d’une demi-heure. J’ai toutefois réussi à un peu suivre vu que j’avais lu le livre, mais sans ça, ça aurait été très compliqué car mes oreilles ne sont pas habituées à cet accent.

Un conseil, si vous passez un jour devant le 5150 Rue des Ormes, ne vous y arrêtez surtout pas!

Par contre si vous le croisez au détour d’une allée chez votre libraire, n’hésitez surtout pas!

[ Au passage, je remercie sincèrement mes amis Facebook venus en nombre m’aider suite à un SOS lancé car j’avais un mot sur le bout de la langue, je voulais impérativement le trouver pour le mettre dans ma chronique, mais personne n’a réussi à me le trouver et finalement j’ai modifié ma phrase 😀 En fait je crois que le mot n’existe que dans ma tête, ah ah !]

2 réflexions au sujet de “5150 Rue des Ormes – Patrick Senécal”

  1. Seul blog que je suis 😉

    J’apprécie la qualité de rédaction, les avis développés et francs.
    Anaïs est une passionnée passionnante.
    Elle sait nous donner envie d’entrer dans un univers que l’on ne connaît pas par exemple.
    Très assidue dans ses chroniques, elle prend énormément de temps pour nous retranscrire son ressenti, ce qu’elle fait admirablement bien.

    Une petite nana qui deviendra grande dans ce monde livresque 🌹

    J’aime

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